Bravo Sonia pour ce joli texte
J’apprends la patience et l’ennui,
Le goût de l’instant, la joie de chaque jour,
J’apprends que la tristesse du cour est nuage,
Et nuage aussi le plaisir.
Que fais-tu grand-mère, assise-là, dehors, toute seule?
Eh bien, vois-tu, j’apprends.
J’apprends le petit, le minuscule, l’infini,
J’apprends les os qui craquent, le regard qui se détourne.
J’apprends à être transparente.
À regarder au lieu d’être regardée.
J’apprends le goût de l’instant quand mes mains tremblent,
La précipitation du cour qui bat trop vite.
J’apprends à marcher doucement,
A bouger dans les limites plus étroites qu’avant
Et à y trouver un espace plus vaste que le ciel.
Comment est-ce que tu apprends tout cela, grand-mère ?
J’apprends avec les arbres, et avec les oiseaux.
J’apprends avec les nuages.
J’apprends à rester en place et à vivre dans le silence.
J’apprends à regarder les yeux ouverts et à écouter le vent.
J’apprends la patience et aussi l’ennui:
J’apprends que la tristesse du cour est un nuage,
Et nuage aussi le plaisir:
J’apprends à passer sans laisser de traces, à perdre sans retenir et à
recommencer sans me lasser.
J’apprends à me réjouir au début du printemps et à la fin de l’automne,
A voir un arc-en-ciel dans une goutte de pluie
Et une vie entière dans une gouttelette de soleil qui scintille sur une
pierre.
J’apprends que les chemins se divisent et se perdent,
Que les regrets sont de petites pierres pointues qui blessent les mains qui
les enserrent
Et qu’il est meilleur que nos mains restent ouvertes.
J’apprends mes erreurs, mes chagrins, mes oublis,
Et toutes les joies qui se faufilent, poissons d’argent dans la masse de
notre vie.
Grand-mère, je ne comprends pas : pourquoi apprendre tout cela ?
Parce qu’il me faut apprendre à regarder les os de mon visage et les veines
de mes mains,
A accepter la douleur de mon corps, le souffle des nuits et le goût précieux
de chaque journée.
Par ce qu’avec l’élan de la vague et le long retrait des marées,
J’apprends à voir du bout des doigts et à écouter avec les yeux.
J’apprends qu’il est de temps perdu, de temps gagné,
Mais que l’infini est là, dans chaque instant. Cadeau trop souvent refusé
dans le torrent des jours.
J’apprends qu’il faut aimer, que le bonheur des autres est notre propre
bonheur,
Que leurs yeux se reflètent dans nos yeux et leurs cours dans nos cours.
J’apprends à marcher sur des sentiers étroits sans peur,
A regarder les montagnes qui se profitent au loin et que je n’attendrai pas:
J’apprends les milliers de pas qui ont marché avant moi sur ces même
sentiers.
J’apprends les vieilles traces et les jeunes nuages.
J’apprends qu’il faut se tenir prêt à partir quand le vent souffre:
Qu’on avance mieux en se donnant la main:
Que même un corps immobile danse quand le cour est tranquille.
Que la route est sans fin, est pourtant toujours exactement là.
Et avec tout ça, pour finir, qu’apprends-tu grand-mère ?
J’apprends, dit la grand-mère à l’enfant, j’apprends à être vieille.
Sonia
c’est vrai que c’est un vrai beau texte
Bizoux
Bonjour, Valérie, c’est magnifique c’est moi
Merci, bravo à Sonia
Bon WE ici sous la pluie
Bises
Je reviens doucement après un malaise vagual
Suzanne
Superbe texte très bien écrit, bravo Sonia !!!
ARSENE GRISALI